dimanche 10 février 2013

Le Libéralisme ... démesure et inégalités.






Il y a près de 2500 ans, Aristote a forgé pour qualifier la tendance d’un individu à rechercher, en usant de ruses et de stratégies, le profit en vue de l’acquisition de richesses et de leur jouissance, le mot chrématistique, et les Grecs, employaient le mot hybris ou hubris pour qualifier toute outrance dans le comportement, tout sentiment violent né de l'orgueil qui allait jusqu'au dépassement des limites, la démesure en quelque sorte.

Les événements qui ont conduit à la crise de civilisation que nous traversons actuellement sont caractérisés par ces deux mots, chrématistique : amour de la monnaie, de l’argent, jouissance de la richesse, et hubris : démesure.
Ce sont elles qui sont la cause de l’explosion de l’économie financière, du formidable décalage entre économie spéculative et économie réelle et la cause du dérèglement écologique planétaire.

Chaque jour, les transactions financières représentent en moyenne 8000 milliards de dollars. Seulement environ 3 % de cette somme sont liés à l’économie réelle soit 240 milliards de dollars, le reste n’est que spéculation et économie virtuelle.

Quelques autres données annuelles donnent le vertige :
- La publicité mondiale : 500 milliards de dollars,
- Le marché des stupéfiants : 500 milliards de dollars,
- Le marché de l’armement : 400 milliards de dollars.

En regard de ces sommes démesurées, on a calculé qu’en mettant seulement 40 milliards de dollars de plus sur la table on pourrait régler les problèmes d’eau potable, de faim, de soins de base et la question du logement dans le monde.
Dans le même temps, les États européens, pour sortir de la crise financière qu’ils ont eux-mêmes engendrée, ont injecté dans leur économie 1000 milliards de dollars et le FMI estime à 4.054 milliards de dollars les pertes liées à des dépréciations d'actifs financiers américains (2.712 milliards), européens (1.193 milliards) et japonais (149 milliards).

Ces milliards de dollars où peuvent-ils les prendre ?
Le plus simplement du monde … dans notre poche, celle des contribuables.
Sont-ce les contribuables qui doivent éponger les pertes de l’économie casino, cette formidable machine à produire des inégalités, cette démesure, cette hubris ?
250 ultra riches ont, actuellement, l’équivalent de la fortune et des revenus de 2.5 milliards d’êtres humains !

En France, on a été capable de mettre sur la table 15 milliards de cadeaux fiscaux aux riches et on a toutes les peines du monde à trouver 1.5 milliards pour le revenu de solidarité active (RSA) destinés aux plus pauvres qui d'ailleurs, par dignité, n'en profitent pas tous.

Déjà en 1930, Keynes affirmait : « c’est n’est pas une crise économique, c’est une crise de l’économie, c’est une crise de la surproduction, et nous risquons à terme une dépression nerveuse collective ».

La seconde guerre mondiale a retardé l’échéance et il a fallu attendre 80 ans pour que sa prédiction se réalise.
La même année, Freud, dans son livre Malaise dans la civilisation faisait un constat similaire sur le psychisme collectif et les pulsions mortifères des sociétés.
Henri Ford disait qu’une entreprise était en danger lorsque le salaire du PDG était dix fois supérieur au salaire le plus bas de l’entreprise, aujourd’hui nous dépassons le rapport démentiel de 1 pour 1000, si ce n’est plus.

Il faut arrêter le massacre, s’il n’est pas trop tard, et considérer une autre façon de faire fonctionner la société. Il faut sortir de l’hubris général qui nous conduit au désastre avec la concomitance entre la crise écologique, la crise sociale et la crise financière.

Aujourd'hui, il ne faut pas traiter d'un côté la crise financière en récitant le crédo de la croissance et de la règle d'or, comme le fait l'actuel exécutif "socialiste", tout en oubliant ou en feignant de traiter la crise écologique et la crise sociale.

La théorie de la grande maison TERRE est première par rapport à nos petites maisons. Si la grande maison est en danger, alors qu’en est-il de nos petites maisons ?

Il faut reconsidérer la richesse et nos relations à la société. Savoir :
- Quel est le sens réel de nos vies ?
- Dans quelle société nous voulons vivre ?
- Quelle société nous voulons laisser à nos enfants ?

La chrématistique et son corollaire, l'hubris, sont les mécanismes du creusement des inégalités et du pillage des ressources de la planète.
On parle d’homo sapiens sapiens, mais comme le dit Edgar Morin, on ferait mieux de parler d’homo sapiens demens parce que notre génie et notre folie sont fortement imbriqués, à moins que cette crise de civilisation nous conduise à devenir vraiment sapiens sapiens.

 
Essayons de rester optimistes...
Jean-Claude Vitran et Jean-Pierre Dacheux
 

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