vendredi 21 août 2009

Un anniversaire politique de vive actualité

Nous sommes le 21 août 2009. Voici 220 ans, du 20 au 26 août 1789, à Versailles, l’Assemblée Constituante, discutait et votait la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen. Qui va célébrer cet anniversaire ?

Plus d'un siècle auparavant, le 26 mai 1679, en Angleterre, avait été proclamé le Bill d’Habeas Corpus qui réglait, avec précision, le droit de l’inculpé et du détenu. En 1688, avait été renversé le roi, Jacques II, et proclamé le Bill of Right qui marquait le passage d’une monarchie de droit divin à une monarchie constitutionnelle fondée sur un contrat.


Le Bill of Right est encore fréquemment déchiré et, malgré le Bill d'Habeas Corpus, le plateau de la justice est souvent écrasé, à droite


Enfin, le 4 juillet 1776, les habitants des colonies anglaises d'Amérique avaient proclamé leur indépendance dans une très belle Déclaration qui a énoncé, pour la première fois, le « droit au bonheur ».



Thomas Jefferson, auteur de la déclaration d'Indépendance.

La Déclaration française des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 réalise la synthèse de ces textes et des idéaux politiques du « Siècle des Lumières ». Elle s'applique à l'ensemble des êtres humains, hommes et femmes réunis, conformément au genre neutre du mot Homme dans la langue française. Le texte ne fait référence à aucune religion, ni aucun régime politique particulier.

Louis XVI, qui s'opposait fermement à l'Assemblée nationale, se résolut à ratifier la Déclaration, le 5 octobre 1789, sous la pression du peuple, accouru de Paris à Versailles, et sur l'insistance du Marquis de La Fayette.

L'Article premier, le plus beau et le plus important, énonce : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits, et : « Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune ». Il récuse les privilèges et porte en germe la condamnation de l'esclavage comme des ségrégations sexuelles, religieuses ou raciales.

La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, avec les décrets des 4 et 11 août 1789 sur la suppression des droits féodaux, constitue l’un des textes fondamentaux votés par l'Assemblée Constituante. Elle comporte un préambule et 17 articles qui mêlent des dispositions concernant l'individu et la Nation. Elle définit des droits « naturels et imprescriptibles » comme la liberté, la propriété, la sûreté, la résistance à l'oppression. La Déclaration reconnaît également l'égalité, notamment devant la loi et la justice. Elle affirme, enfin, le principe de la séparation des pouvoirs. Elle sert de préambule à la première Constitution de la Révolution Française, adoptée en 1791.

Bien que la Révolution ait, par la suite, renié certains de ses principes et élaboré deux autres déclarations en 1793 et 1795, c'est le texte du 26 août 1789 qui est devenu la référence des institutions françaises, notamment dans les Constitutions de 1852, 1946 et 1958.

La Déclaration de 1789 a inspiré, au XIXe siècle, des textes similaires dans de nombreux pays d'Europe et d'Amérique latine et la Convention européenne des Droits de l'Homme, signée à Rome, le 4 novembre 1950, reprend en partie la tradition révolutionnaire française.

Robert Badinter, ancien ministre de la justice dira, à ce sujet : « La Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789, même si elle est postérieure à la Constitution des États-Unis et à la Déclaration d'Indépendance, est un texte majeur dans l'histoire de la pensée et de la liberté parce qu'elle a imposé l'idée d'universalité des droits de l'homme. Que nous nous soyons toujours inspirés de la Déclaration de 1789 crée, entre la France et les droits de l'homme, un lien historique et affectif continu ».

Cette première pierre à l’édifice démocratique, fondateur de notre République, a été suivi par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1793. Cette dernière a abouti à la Constitution de l'an 1 qui ne fut jamais appliquée, mais dont la mise en place fut souvent réclamée par la gauche française jusqu'au début du XXe siècle, le premier projet de Constitution de 1946 faisait, d'ailleurs, référence à cette déclaration.

Ce qui distingue la Déclaration de 1793 de celle de 1789, c'est la tendance égalitaire. L'égalité, comme premier droit naturel de l'Homme, est le mot d'ordre de la Déclaration. Ainsi, dès l'article 3, il est prévu que « Tous les hommes sont égaux par nature et devant la loi ». L'égalité est aussi le premier droit présenté à l'article 2. Pour les rédacteurs de la Déclaration de 1793, l'égalité n'est pas seulement civile mais aussi naturelle. À l’époque, pourtant, on estime déjà que la liberté et l’égalité peuvent devenir contradictoires et l’on se pose la question de savoir comment on peut aplanir, ou compenser, les inégalités sociales. L'article 21 proclame le droit de tout citoyen à l'assistance publique : la société est redevable au citoyen d'une assistance, d'un droit au travail et chaque citoyen peut donc revendiquer un travail. L'article 22 proclame le droit à l'instruction en dehors de la charge anciennement assumée par l'Église. Ces droits font partie de ce que l'on appelle la deuxième génération des droits de l'Homme : les droits économiques et sociaux. Ces droits, cette égalité naturelle, supposaient une intervention accrue de l'État, en accord avec le but fixé à l'article premier : « le bonheur commun ». L'article 25 réaffirme que la souveraineté réside bien dans le peuple. La liberté individuelle est maintenue et certains de ces aspects sont mieux définis que dans la Déclaration de 1789. En effet, la Déclaration de 1793 prévoit la liberté de culte, la liberté de commerce et d'industrie, la liberté de la presse, la liberté de se réunir en sociétés populaires et enfin le droit de pétition.

Trois articles sont consacrés au droit de résistance à l'oppression; ils précisent sa forme et son étendue. Même lorsque cette oppression n'atteint qu'un seul individu, la résistance est possible. Cette résistance peut être passive, par la grève, ou bien active, par la manifestation. La Déclaration reconnaît l'insurrection populaire contre un pouvoir oppressif, tyrannique et, despotique comme un devoir et l’affirme dans le 35ème et dernier article : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple, et pour chaque portion du peuple le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ».


Les discussions de l’époque furent souvent âpres et rugueuses. Il ne faut pas oublier que nous sortions de 1500 ans de royauté de droit divin et que beaucoup de députés étaient monarchistes. Et pourtant, beaucoup des idées de l’époque n’ont pas pris une ride et devraient encore servir de base de réflexion et d’action à nos gouvernants, si prompts à s’emparer des idéaux historiques lorsque cela les arrange.

Rappelons nous seulement le travail des Jacobins, même si Jean Jaurès leur reprochait d’avoir voulu faire vivre le peuple français « à bon marché », d’exclure à la fois le communisme et la richesse, mais aussi d’avoir inauguré l’ère totalitaire en instaurant la terreur, cela me semble bien exagéré en comparaison avec ce qui se passe aujourd’hui dans le monde.

Faisant écho à Jean Jacques Rousseau qui affirmait que « les fruits sont à tous, et la terre à personne », Robespierre affirme que la propriété ne peut jamais être en opposition avec la subsistance des hommes. Cette opinion est réaffirmée par Saint Just qui, critiquant les thèses d’Adam Smith, disait « que des hommes durs, qui ne vivent que pour eux, portent atteinte gravement à l’harmonie sociale ».

A la lecture de ces écrits fondateurs, nous pouvons mesurer l’importance de la régression de notre société au sujet de la justice, de l’égalité et des libertés.

Pourtant, il y a 220 ans, tout était là pour un projet de société fondée sur la justice, la réciprocité, sur le droit à l’épanouissement, à la solidarité, à la fraternité et au respect des équilibres naturels. Un projet qui n’attend que vous, que nous et auquel il est encore possible de donner vie.

Il est là, ce projet, il n’attend que vous, que nous, rejoignez-nous pour lui donner vie. C’est l’objectif que s’assignent, notamment, les citoyens qui s’engagent au sein de la Ligue des Droits de l’Homme.

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Jean-Claude Vitran









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