jeudi 2 avril 2009

Louis Albrand, un honnête homme...



Une commission chargée par Rachida Dati d'un rapport sur la prévention du suicide en prison a rendu son rapport ce jeudi. Mais le président de ce groupe, le psychiatre Louis Albrand, a boycotté ce rendez-vous. Il accuse les autorités d'avoir édulcoré la version finale du texte pour que la hausse des suicides ne soit pas attribuée à la surpopulation carcérale.

38 détenus se sont donnés la mort depuis le 1er janvier 2009, dans les prisons françaises. Notre pays détient, en Europe, un effroyable record! On n'en est plus aux années 1970!



Le psychiatre ne se reconnaît pas son texte dans le rapport final. "Il a été modifié. Ce n'est pas le rapport princeps de la commission que j'ai présidé !" s'est-il insurgé. Il accuse l'Administration pénitentiaire d'avoir édulcoré le texte de la commission. Ce dernier mettait en cause la surpopulation carcérale - 62 700 détenus pour 51 000 places - pour expliquer la hausse des suicide. La dernière mouture, elle, s'en prend aux media: "Les difficultés et les angoisses de la société abondamment relatées par les media trouvent un écho en détention. Expliquer les suicides uniquement par les conditions de détention inhumaines et dégradées apparaît donc particulièrement réducteur", dit le rapport publié par le ministère!

Que vaut donc la peau d'un homme, en prison? Rien?

Que des dizaines de prisonniers se soient donnés la mort, ces dernières années, plutôt que de continuer à vivre ce que l'incarcération leur faisait subir, signifie, brutalement, que la peine de mort est bel et bien réinstaurée dans notre pays. Que nous fassions silence sur cette horreur révèle ce qu'il en est des droits humains, sous un régime sécuritaire qui punit, sans donner le moindre espoir d'une réinsertion, et surtout sans douter du caractère inné de la criminalité! Supporter qu'on vive en société en faisant de la violence anti-violence de l'État une violence implacable et aussi désastreuse que la violence criminelle elle-même, conduit tout droit à la mort de la démocratie.

Car les mois qui viennent pourraient bien conduire vers des situations de plus en plus tendues et chargées d'une violence qu'on mettra, bien entendu, au compte de la délinquance présente dans une partie de la population, la plus en souffrance, évidemment! Demain, quand les émeutes de la misère et la colère des désespérés, privés d'emploi et de revenus, feront exploser l'agressivité dans nos cités, sans doute pensera-t-on à faire donner l'armée contre le peuple, comme on a toujours fait en période de désastre. Mais ne devrions-nous pas regarder la réalité bien en face : les plus grands terroristes sont d'abord ceux qui font vivre dans l'hyper angoisse du lendemain, et le malheur, des millions de personnes! La pire violence est, de plus en plus visiblement, la violence de ceux qui ruinent les salariés, se servent largement puis se gobergent, sans vergogne, impunément car sans craindre la prison ni les rigueurs de lois faites pour eux...

Le psychiatre Louis Albrand, qui ne veut pas que son travail soit détourné et que ses recommandations passent aux oubliettes est un homme honnête et courageux. Ne nous contentons pas, pourtant, de saluer le refus de ce citoyen qui éclaire, crûment, l'inhumanité des pouvoirs publics. C'est toute la société française qui doit s'interroger! Nos prisons sont notre honte. Nous avons fermé les yeux sur la surpopulation carcérale. mais, désormais, se taire, c'est être complice du crime.

Lire l'article complet du JDD :
http://www.lejdd.fr/cmc//societe/200914/prison-suicide-et-polemique_199425.html


Lisez "Ban public" : http://prison.eu.org

Jean-Pierre Dacheux

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